Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
le cri du peuple

Al Carbone et les incorruptibles gilets jaunes

13 Novembre 2018 , Rédigé par le cri du peuple

La taxe carbone est une taxe dite Pigouvienne (d’Arthur Cecil Pigou économiste anglais qui les proposa en 1920). La taxe pigouvienne s’applique sur les coûts de ressources ou produits générateurs d'effets négatifs sur le bien être de la population (externalités négatives en économie) entrainant un coût social. Le charbon ou le pétrole dégagent des gaz polluant présentant des risques pour la santé ou participant à l'effet de serre ce qui induit des coûts de traitement des maladies et des coûts de réparation des dommages provoqués par le changement climatique. Cette taxe en augmentant le prix de ces produits générateurs de nocivités (les carburants pétroliers dans le cas de la taxe carbone) constitue un signal-prix en conduisant  le «marché» à exprimer un coût véritable forcément plus élevé et donc amène les agents de ce «marché» à choisir des ressources moins chères et moins émettrices d’externalités (gaz plutôt que pétrole) ou à choisir un équipement moins consommateur de ressources (véhicule électrique plutôt qu'à combustion thermique). Et par la même à avoir un comportement social plus respectueux notamment de l’environnement. La taxe carbone est donc ce que l'on pourrait appeler une "taxe comportementale".

Pour que l'instauration de cette taxe puisse avoir les effets attendus, qui ne doivent pas être juste de prélever un peu plus d'argent dans la poche des consommateurs de carburants sous prétexte de protection de l'environnement; plusieurs préalables sont nécessaires.

Il faut en premier lieu que l'offre de ressources alternatives existe réellement, qu'elle soit économiquement viable pour les agents économiques et surtout meilleur marché. Ensuite que les équipements plus économes puissent être véritablement fiables, disponibles à court ou moyen terme et amortis rapidement en terme de coût global (équipement + consommation de ressource). Aussi que les infrastructures permettant une utilisation de ressources de substitution soit existantes et suffisantes. Enfin que le prix des ressources que l'on veut pénaliser ne subissent pas de fortes variations à la baisse. Et surtout pour une plus grande acceptation par tous d'une telle taxe qui peut avoir des impacts non négligeables sur le pouvoir d'achat, il convient que la totalité des recettes de la taxe perçue soit affectée à l'aide à l'investissement des agents pour des équipements plus sobres ou utilisant une ressource de substitution.  

Si on fait une analyse rapide de la situation en ce qui concerne les éventuels impacts sur l'économie française de l'instauration d'une taxe carbone on peut noter plusieurs points.

Le recours immédiat à des ressources d'énergies alternatives moins émettrices de carbone (électricité par exemple) est rarement possible et demande souvent un remplacement d'équipements. De plus l'accès à l'offre alternative en France est souvent insuffisant (90 points d'avitaillement en GNV en 2018) ou mal réparti (10% des 10060 stations de recharge électrique pour véhicule sur 3 départements en 2018).

Compte tenu du stock disponible des équipements ou matériaux de remplacement relativement faible au regard de la demande générée par l'instauration de la taxe carbone et du délai de fabrication de ces équipements (plusieurs mois pour une voiture), on peut penser que les délais de mise en place de ces équipements plus sobres vont de quelques mois à quelques années. Le changement d'équipement n'est donc envisageable que sur le moyen ou long terme quand bien même sont instaurées des aides incitatives au changement (prime à la casse et autres). Et il est nécessaire que le retour sur investissement soit le plus court possible pour inciter les agents économiques au changement. Ce retour sur investissement sera d'autant plus court si la différence entre la taxe carbone de la ressource la plus polluante et celle de la moins polluante est importante. Qui plus est tout investissement que ce soit par les particuliers ou les entreprises a un impact sur le pouvoir d'achat des ménages (emprunt et intérêts à rembourser, prix à la consommation qui augmentent suite à la répercussion de l'investissement des entreprises sur les coûts de revient ). Il peut aussi avoir des incidences sur l'épargne au travers des ponctions opérées soit pour l'apport souvent nécessaire pour obtenir un crédit ou soit  pour le  financement complet de l'investissement.  A noter qu'il peut y avoir aussi un effet rebond (paradoxe de Jevons) qui peut amener à une consommation plus importante de la nouvelle ressource moins polluante par rapport à la consommation de l'ancienne ressource et induire des émissions de carbone équivalentes voire plus importantes.

En France la fiscalité carbone est intégrée à la TICPE et donc ne s'applique que sur tout produit utilisé comme carburant pour moteur, à l’exception du transport fluvial de marchandises, et avec des niveaux d’exonération pour plusieurs secteurs d’activité (transport public, taxis, agriculteurs…) ainsi que les carburants de chauffage.

A noter qu'en 2016 sur les 3.8mds d'euros collectés au titre de la fiscalité carbone, 3mds ont contribué au financement du CICE!!!! (source Ministère de la Transition écologique et solidaire). Rappelons nous que le CICE est un dispositif mis en place sous la présidence de François Hollande grandement influencé par un jeune énarque passé par l'inspection des finances puis par la banque Rotschild avant de réintégrer la fonction publique Macron Emmanuel. Ce dispositif visait à instaurer un crédit d'impôt (remboursement d'une partie de l'impôt) pour les entreprises sous certaines conditions d'emplois et d'exposition à la concurrence internationale. On peut donc dire en raccourci que l'argent qui a été ponctionné dans la poche des ménages par la taxe carbone a été redonné aux entreprises avec le CICE et en partie redistribué aux détendeurs du capital financier des entreprises grâce aux gains de marges dégagés. 

La majeure partie des dépenses de ressources d'énergies potentiellement soumises à une taxe carbone sont des dépenses contraintes en particulier pour les entreprises de transport routier et les habitants des régions rurales, peu urbanisées et souvent mal desservies par les transports en commun.

En 2006 selon une étude de l'INSEE la part des dépenses d'énergie pour le logement et les transports dans le budget des ménages était de 5.7% pour un habitant de Paris et de 11.3% (le double) pour un habitant de zone rurale. Si l'on raisonne en terme de niveau de revenu le pourcentage était de 7% pour les 20% les plus riches et de 9.6% pour les 20% les plus pauvres enfin selon le type de chauffage la part allait de 5.5% pour les ménages ayant un chauffage collectif à 12.8% pour ceux ayant un chauffage individuel au fioul.

Quand on sait que la concentration de riches est plus forte à Paris que dans les campagnes et que le chauffage individuel au fioul est plus présent en zone rurale qu'à Paris on peut en déduire que l'impact d'une taxe ou hausse de taxe carbone sera beaucoup plus fortement ressenti dans les campagnes ou zones péri-urbaines qu'en ville ou à Paris en particulier et dans les couches populaires que dans les couches privilégiées. Et donc aussi que les plus pauvres ont contribué au travers de la taxe carbone affectée au CICE à l'enrichissement des plus riches. 

Selon le Référentiel prix de revient du CNR (Comité National Routier) la part carburant dans l'élaboration du prix de revient du transport routier varie entre 23.5% à 18.1% du coût de revient d'exploitation d'un camion. Si l'on considère une taxe carbone de 0.04€ par litre de gazole comme prévu, l'impact sur le coût de revient du transport routier sera une hausse de un peu moins de 1%.  Les coûts de transport représentent de 3 à 6% du coût de revient d'un produit de grande consommation. Même si l'incidence de cette hausse peut paraitre minime, elle représente un potentiel inflationniste de 0.4% .

L'instauration d'une taxe carbone plus importante devrait conduire dans un premier temps à une augmentation des coûts de transport routiers (95% des transports terrestres en France) et donc à une augmentation des prix à la consommation. L'effet conjugué de cette augmentation des prix avec l'augmentation des dépenses de carburant pour les ménages devrait engendrer à court terme une baisse de la consommation. Et donc une perte de recettes fiscales pour l'Etat.

A plus long terme si le prix du pétrole ne baisse pas et n'augmente pas trop , le changement d'équipements ainsi que le recours à des ressources moins émettrices de carbone devrait conduire à une baisse effective des consommations d'énergies polluantes au prix probable d'un accroissement de l'endettement des ménages et des entreprises. Cela pourrait aussi entrainer à une hausse de l'emploi en particulier dans le secteur de la transition écologique.

 

Tenir et résister

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article